Demain j’aurai 30 ans, et je suis tétanisée. Demain, la barre fatidique sera passée… je vous ai tellement charrié, les copines, les soeurs, avec l’âge, la trentaine, cette barrière mentale, imaginaire, tenace, dans ma tête, entre les « jeunes » et les « vieux ».

J’avais juste peur de vieillir finalement. De perdre mon goût de la fête, des sorties, d’entrer dans un monde de « grands », avec des responsabilités, et tout et tout… Mais, en parallèle, à 30 ans, je me voyais bien maman, avec 3 ou 4 bambins, et ça me faisait rêver… Je me voyais en femme accomplie et sereine… Et ça, étonnement, ça ne me faisait pas flipper… Conventions sociales, quand vous nous tenez…

Bref, demain j’ai 30 ans. Et d’ici là, je ne serai pas maman, pas mariée et même pas maquée…! En revanche, à l’image de la soirée d’hier, je n’ai en rien perdu mon goût de la fête! Boire des coups, tutoyer la nuit, enfiler de hauts talons et marcher sur un fil, jouer avec les étoiles du soir, rire, virevolter, s’enivrer… ça ne m’a pas quitté.

Loin de l’image de la vieille bique que j’imaginais. Loin de la trentenaire austère que je vomissais. En m’approchant de ce chiffre rond, en apprivoisant les années, qui finalement coulent doucement mais assez sûrement, je suis arrivée là, à l’aube de ce jour que j’imaginais comme un précipice. Finalement, il n’y aura pas de jugement dernier, pas de cour devant laquelle je devrais répondre d’obligations ennuyantes, pas de jury, pas de vigiles à l’entrée, pas de grand mur froid… Il y aura la vie, qui s’ouvre à moi. L’aisance d’une vie de femme qui a finalement pas si mal mené sa barque, l’assurance encore fragile d’une femme qui a été aimée plus que de raison parfois, qui a grandi de chaque expériences, qui en a connu des vertes et des plus mûres, des rudes parfois, des détonnantes souvent.

Finalement, demain tout sera assez normal… Le monde aura continué de tourner, les oiseaux de chanter, les gens de flâner dans la rue, le soleil de briller… Tout sera comme avant. Avec juste, une bougie de plus, un futur à inventer. J’essaierai peut-être d’être un peu plus sage, d’apprendre à me poser chez moi, plus de quelques minutes, de ranger, de boire de l’eau, de manger sainement… J’essaierai sûrement. Ou peut être pas. Parce que 30 ans ou pas, on ne devient pas une autre. On reste la même qu’à 20 ans… avec 10 ans d’expérience. Et c’est pas grave. Non Perrine, c’est pas grave. Ce qui serait grave, ce serait de vouloir être une autre, de se perdre en route, d’essayer coûte que coûte de rentrer dans un moule pas taillé pour moi. La trentaine n’est pas livrée avec un cahier des charges. Chacun lui donne la dimension qu’il veut. Et peu importe les rêves qu’on avait avant… Avant c’était hier, et demain c’est le jour J. Trop tard pour faire machine arrière alors autant faire tapis, jouer toutes ses cartes, y aller en courant, sourire aux lèvres et port altier. Allez, même pas peur. Demain, j’ai 30 ans. Et je serai la même. Toujours la même, un peu bohème.